Jennifer Still | Résidence pour artistes au Mont-Riding 2024

Photo : extrait de « legs » (2022), un film-poème réalisé en collaboration par Christine Fellows, Chantel Mierau et Jennifer Still.

La résidence pour artistes au Mont-Riding donne aux artistes professionnels du Manitoba le temps de se concentrer sur leur travail dans le splendide milieu naturel du parc national du Mont-Riding.

La dernière artiste résidente pour 2024 est Jennifer Still. Avant de s’installer dans le chalet historique de Deep Bay, Jennifer a répondu à quelques-unes de nos questions sur son travail et sur la manière dont elle passera sa résidence.


CAM : Parlez-nous un peu de votre pratique et de vous en tant qu’artiste.

Jennifer Still : Ma poésie s’inspire du travail physique et de la beauté. J’aime développer ma notion de la page pour savoir combien elle peut contenir, non seulement des mots, mais aussi des matériaux, des graines, des ombres, des trous d’épingle et des collages. La composition de mes poèmes comprend des éléments tactiles et physiques et mes poèmes laissent des empreintes digitales boueuses sur la page! Ma pratique de l’écriture est remplie de mouvement, exposée aux éléments, à l’écoute du monde naturel et en harmonie avec ma voix intérieure. J’adore les vérandas, les patios grillagés et les passages recouverts. Les espaces liminaux qui représentent tant l’intérieur que l’extérieur. Plus que jamais, je vais situer le poème dans mon corps.

J’ai récemment collaboré avec Christine Fellows et Chantel Mierau, des artistes de Winnipeg, pour transformer mon poème legs en court métrage primé. Pour moi, cela a été une expérience extraordinaire de communiquer mon poème à haute voix et en maillot de bain, de faire glisser mes mots au fond d’une piscine!

Je découvre maintenant que la poésie peut aussi être une performance que l’on peut vivre au moyen de divers médias, comme projet d’écriture ou hors de l’écriture. Pendant ma résidence, j’aimerais que les visiteurs du parc puissent visionner legs dans le théâtre du centre d’accueil.

Jennifer Still. Photo par Chantel Mierau.

Parlez-nous du projet qui occupera votre temps au chalet de Deep Bay. 

Je travaille actuellement sur une nouvelle série de poèmes intitulée Garden Dance : poems for movement qui constituera la base du scénario de ma prochaine collaboration, qui sera un projet de danse.

L’été dernier, j’ai travaillé comme jardinière à temps plein dans les jardins anglais du parc Assiniboine. J’avais toujours en ma possession un carnet rose néon dans lequel je notais sur chaque page des noms de plantes, des schémas, des observations, des ailes d’insectes, des fleurs séchées et des feuilles. Je suivais les nervures foliaires, les lenticelles, les plantes en fleur, les parasites et les racines. C’était là les chuchotements intérieurs de ma poésie. Ma truelle est devenue mon stylo. Le sarclage était l’édition. Les poignées de la brouette étaient une prolongation de mes bras. En regardant derrière moi, j’ai vu que le tuyau d’arrosage rouge avait écrit un gigantesque « & » dans l’herbe.

Au cours de ma résidence, je vais rédiger des poèmes inspirés du travail et de la beauté de mon expérience de jardinage. Je vais écrire pendant que je suis en mouvement, en plein air, sur le quai, sur le porche du chalet et dans les jardins. Je vais me créer une pratique quotidienne qui consiste à observer et à écrire dans les jardins de plantes vivaces et de prairie naturelle près du centre d’accueil.

Quelle est votre relation avec le parc et qu’est-ce que vous avez le plus hâte d’explorer?

J’ai découvert le parc national du Mont-Riding lors de ma première résidence à Deep Bay en 2012. J’ai appris à plonger la tête la première dans le lac. Pour moi, cela a été une grande réussite. De faire confiance aux profondeurs que l’on ne voit pas.

J’ai forgé une relation spéciale avec une chenille épineuse de l’orme qui était suspendue au-dessus de la porte du chalet d’écriture. Elle est restée là pendant deux années consécutives. Est-ce que c’était la même chrysalide ou une nouvelle génération? Quoi qu’il en soit, j’avais l’impression que la chrysalide était liée aux poèmes que j’écrivais, une lente transformation des mots qui se réorganisaient patiemment, se préparant à éclore!

Je suis retournée au parc avec ma famille à chaque été pour sauter du quai, écouter les huards au lever du soleil et être étrangement fascinée par la vue de mes propres pieds suspendus dans l’eau profonde et claire du lac.

Extrait de « legs » (2022), un film-poème réalisé en collaboration par Christine Fellows, Chantel Mierau et Jennifer Still.

Quelle influence ou inspiration espérez-vous retirer de votre projet ou de votre pratique dans le parc?

Je suis ravie de pouvoir écrire et rêver si près d’un lac, à proximité des sons des vagues et du vent et de l’odeur des aiguilles de pin. J’ai hâte de savoir comment le rythme de mes poèmes sera guidé par l’expérience sensorielle d’être dans une forêt, d’écrire sur un quai et d’écouter les vagues, les chants d’oiseaux et le vent dans les grands arbres. J’ai également hâte de savoir quelle influence les jardins de fin de saison et la lumière de septembre auront sur ma poésie.

Qu’aimeriez-vous que le public et le personnel du parc sachent à propos de vous et de votre travail ?

Mon expérience de jardinage estival m’a appris que notre façon de nous occuper de nos plantes peut révéler notre façon de nous sentir par rapport à nous-mêmes. Dans le jardin, j’ai appris à tendre la main partant d’un lieu plus près de mon cœur, sans recours au contrôle ni à la force, mais avec une nouvelle acceptation de « ce qui est ». Je vais apporter cette écoute douce et tactile à la création de mes poèmes et à mes interactions dans le jardin. J’espère rencontrer d’autres jardiniers pendant mon séjour dans le parc. Je m’intéresse particulièrement aux termes botaniques qui ont des éléments en commun avec l’anatomie humaine (p.ex., les bourgeons en forme de doigts et des yeux). Le jardinage et l’écriture ne sont pas très différents : les deux bénéficient d’une main compétente.

Y a-t-il autre chose que vous aimeriez partager avec les lecteurs et la communauté du Parc national du Mont-Riding?

J’adore les bonnets de bain et j’apprends à faire de la nage papillon.


La résidence pour artistes au Mont-Riding est offerte grâce à un partenariat entre le Conseil des arts du Manitoba et le Parc national du Mont-Riding.

Un séjour au chalet de Deep Bay vous intéresse? Renseignez-vous sur la façon de présenter une demande à la résidence pour artistes au Mont-Riding par l’entremise du volet de subventions Apprentissage – Résidences. Envoyez votre demande au plus tard le 15 janvier 2025 pour une résidence à l’été de 2025.