Scout Rexe | Résidence pour artistes au Mont-Riding 2022

La résidence pour artistes au Mont-Riding permet aux artistes professionnels de se consacrer à leur travail dans le chalet historique de Deep Bay, situé dans le magnifique cadre naturel du Parc national du Mont-Riding.

Nous vous présentons ici les artistes en résidence de cette année ainsi que leurs projets passionnants!


CAM : Parlez-nous un peu de votre pratique et de vous en tant qu’artiste.

SR : Je suis dramaturge. Mes œuvres sont axées sur les personnages et, bien qu’elles traitent de thèmes assez lourds, elles sont souvent ludiques et drôles. Je m’intéresse aux différentes approches d’une génération à l’autre aux concepts tels que le féminisme ou la célébrité, et j’implante ces perspectives dans des personnages qui ont du mal à se faire connaître les uns les autres. Mes œuvres traitent essentiellement de jeunes personnages qui apprennent à connaître leurs identités queer et trans. J’aspire à créer des œuvres aussi complexes que les communautés avec lesquelles elles engagent le dialogue, des œuvres qui approfondissent ou élargissent notre compréhension de nous-mêmes et du monde dans lequel nous vivons.

Chaque projet apporte ses propres questions et demande à être mis au monde à sa façon. J’essaie d’écouter le plus attentivement possible. C’est une pratique incarnée : je m’efforce d’être un instrument bien rodé par lequel les personnages arrivent à communiquer. C’est également une pratique intellectuelle. Je fais des recherches tout au long du processus de création et, souvent, je reviens aux premières idées et je reprends les premières questions.

Je me sens davantage valorisée lorsque je collabore avec des artistes intelligents et sensibles. Je collabore souvent avec la dramaturge Fatma Sarah Elkashef sur mes projets d’écriture; nous adoptons une perspective assez large quant à la nature d’une pièce et ce qu’elle pourrait devenir. C’était le cas, p. ex., de la pièce Cult Play, une enquête sur l’attrait des sectes, ce que nous sommes prêtes à sacrifier pour nos croyances et l’attirance d’une femme pour une autre. J’ai travaillé avec Liam Zarrillo comme dramaturge culturel et interprète sur O Death et, cet hiver, je vais dramatiser une pièce dans laquelle iel joue le rôle d’un personnage qui a entrepris un processus de transition tout en se convertissant au judaïsme orthodoxe. J’ai rencontré Kate Hammer lorsqu’elle était interprète dans O Death, et depuis ce temps nous avons commencé la coécriture d’une pièce intitulée Make It, qui traite de la scène artistique queer au Royaume-Uni. Megan Piercey Monafu a fait la mise en scène de ma première pièce, This is the August, et je continue mon travail de dramaturgie pour elle, récemment pour sa pièce qui traite de la réalité virtuelle, Strata Inc., ainsi que sa nouvelle pièce, intitulée Tahiti. Dans ces projets et bien d’autres, je suis ravie de créer des liens avec d’autres artistes et de travailler à la création d’œuvres complexes et sérieuses.

Parlez-nous du projet qui occupera votre temps au chalet de Deep Bay. 

Je vais travailler sur O Death, une exploration nuancée de l’identité trans et queer, de la culture du bannissement et de l’héritage de nos célébrités culturelles.

Après avoir été mis en garde sur les médias sociaux pour être allés trop loin par rapport à un de leurs admirateurs, le musician trans James et sa sœur Caddy doivent faire face aux pressions exercées par leur famille, les médias et le public. En même temps, iels lancent leur carrière musicale en suivant les traces de leur grand-père, une légende du rock, un homme qui a travaillé assidûment à éviter que son passé violent ne soit soumis à l’examen du public.

La pièce est à la fois sombre et drôle. Les conversations familiales intimes sont jalonnées de scènes surréalistes qui offrent un aperçu ludique et non linéaire de la vie intérieure de James. Et puisque O Death est une pièce de théâtre au sujet d’une famille de musicians, nous pouvons écouter leur musique et leurs interprétations de leurs chansons.

Quelle est votre relation avec le parc et qu’est-ce que vous avez le plus hâte d’explorer?

Le parc national du Mont-Riding est un lieu magique. Il est empreint du style architectural rustique des années 1930 que l’on retrouve dans les parcs nationaux du Canada. J’espère que le théâtre du parc sera ouvert pendant mon séjour. Le plus grand théâtre en bois rond de l’Amérique du Nord, il a été élu l’un des plus beaux théâtres au monde.

Le théâtre du parc et le chalet de Deep Bay ont tous deux été financés par des subventions versées par les Travaux publics à l’époque de la Grande Dépression des années 1930, peu après la création du parc. D’abord construit comme chalet pour l’Aviation royale canadienne, l’édifice est resté inutilisé, tout comme un grand nombre d’autres d’espaces au Canada; plus tard, il a été transformé en résidence d’artistes.

Bien que l’histoire autochtone de la région soit riche et diversifiée, le récit le mieux connu est celui d’Archibald Stansfeld Belaney, ou Grey Owl, un Britannique qui s’est fait passer pour un Autochtone et est devenu une célébrité nationale. Belaney a vécu dans le parc pendant six mois et son chalet existe toujours aujourd’hui. À l’intérieur, des photos laminées de Belaney sont affichées aux murs et un cahier refermant sa correspondance se trouve sur un bureau, où les visiteurs peuvent la consulter. On ne mentionne nulle part qu’il avait commis des actes frauduleux.

J’ai toujours été fasciné par nos célébrités culturelles, par les histoires que nous racontons à leur sujet et par les récits que nous ne connaissons pas parce qu’ils ont été effacés.

Quelle influence ou inspiration espérez-vous retirer de votre projet ou votre pratique dans le parc?

Le temps passé dans le parc ressemble à l’idéal platonicien de ce que devrait être la vie d’un écrivain : vivre dans le bois, se réveiller tôt et écrire avec la cafetière à portée de la main, nager dans un lac glaciaire et se rendre au village pour revoir ses écrits de la journée avec un verre au coucher du soleil.

La pièce O Death se déroule dans une maison ronde dans le bois. Comme je suis un citadin, je n’ai pas encore capté le décor ni son influence sur les personnages, c.-à-d. comment il leur permet d’échapper au public et aux médias, d’une part, et comment il contribue un sentiment d’isolement et de piégeage, d’autre part. Le décor semble essentiel à l’expérience de ce récit. Je ne peux penser à un meilleur endroit pour se réfugier et terminer une ébauche.


La residence pour artistes au Mont-Riding est offerte grâce à un partenariat entre le Conseil des arts du Manitoba et le Parc national du Mont-Riding.

Un séjour au chalet de Deep Bay vous intéresse? Renseignez-vous sur la façon de présenter une demande à la résidence pour artistes au Mont-Riding par l’entremise du volet de subventions Apprendre – Résidences. Envoyez votre demande au plus tard le 1er novembre 2022 pour une résidence à l’été de 2023.